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Cela prendra une matinée pour contrôler le ciel libyen

Le colonel Kadhafi, expert en poker menteur, a annoncé un cessez-le-feu. L’intervention aérienne autorisée par la résolution de l’ONU viserait alors à le faire respecter.

Interview du Général Jean-Bernard PINATEL (2S), expert en géopolitique.

Rafale - Armée de l'air

Atlantico : On dit que les Français et les Anglais, qui portaient cette résolution, n’avaient rien préparé sur le plan militaire, pour ne pas donner l’impression à l’ONU que les cartes étaient déjà jouées ?

Jean-Bernard PINATEL : C’est de la fumisterie ! Bien évidemment les militaires s’étaient préparés à une telle hypothèse. Non pas par un pré positionnement de bâtiments, d’avions ou de moyens beaucoup trop visibles, mais en commençant par mettre les soldats nécessaires à une telle intervention en alerte courte. Par ailleurs, ils ont évidemment élaboré des plans d’intervention sur la Libye, qu’ils ont soumis à leurs autorités de tutelle, et c’est sur cette base que les diplomates sont allés demander l’onction de l’ONU, parce que l’intervention militaire est possible.

Pour préparer l’intervention, les Awacs [avions radar NDLR] américains et de l’Otan sont déjà en l’air 24 heures sur 24 heures pour surveiller le trafic aérien sur toute la zone. Les satellites sont déjà pré-positionnés et mitraillent le désert de photos.

On a tout le renseignement qu’il faut pour intervenir, et il est partagé entre les pays qui vont intervenir.
C’est d’autant plus facile à préparer que dans le désert, les troupes mécanisées blindées se voient comme le nez au milieu de la figure.

La Libye dispose de 200 avions, anciens, pilotés par des mercenaires, les pilotes libyens n’étant pas fiables, plusieurs s’étant enfuis à l’étranger.

Cela ne prendra pas une matinée pour obtenir la maitrise totale du ciel libyen, c’est évident ! On a les moyens de le faire quand on voudra le faire. Pour des questions de symbole, il devrait y avoir des avions de la plupart des pays qui ont soutenu la résolution et disposent de moyens aériens dans la région. Il suffit d’un seul appareil en l’air pour être solidaire…

Dès vendredi matin, il y aura des vols de reconnaissance, et peut être même les premières frappes, il n’y a aucune difficulté pour cela avec des avions ravitailleurs, la Libye n’est pas loin. Il ne faut pas oublier que la Libye avait été frappée par des avions américains, partant depuis une base anglaise, en mai 1986. Ces avions avaient bombardé le palais de Kadhafi en faisant des ravitaillements en vol, et ils avaient réussi à le blesser. C’est dans ce palais, toujours en ruines, que Kadhafi, qui avait été blessé lors de ces bombardements, s’est fait interviewer la semaine dernière.

Quelles sont les premières missions des avions de la coalition sur la Libye ?

Tout d’abord mettre la défense anti-aérienne et les appareils de Kadhafi hors d’état de nuire. C’est la première étape que l’on planifiera afin d’empêcher l’intervention des hélicoptères et des avions de Kadhafi.

Dans un second temps, si cela ne suffit pas à arrêter l’avance des troupes mécanisées de l’armée régulière contre Benghazi, on tirera sur ces convois.
Mais je pense que l’on essayera de le faire en causant le moins de pertes, par des tirs d’intimidation tout d’abord, ou simplement en les survolant.

La brigade de Kadhafi qui se trouve à 150 km de Benghazi va se sentir toute nue sans couverture aérienne !

C’est un moment historique dans la mesure où intervenir dans les affaires intérieures d’un pays, par la force, cela n’arrive pas tous les jours.

Il y a eu le précédent des Balkans, de la Bosnie, ou pour mettre fin à une guerre civile meurtrière au cœur même de l’Europe, l’OTAN était intervenue, mais sans mandat de l’ONU. Dans le cas de la Libye, la légitimité internationale de cette intervention est totale, d’autant plus qu’elle bénéficie aussi de l’appui de la Ligue Arabe, ce qui était vraiment important.

Propos recueillis par Jean-Baptiste GIRAUD

Source : Cela prendra une matinée pour contrôler le ciel libyen


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