Situation politique et militaire en Irak – Début décembre 2016
Situation politique
La situation politique en Irak a été marquée en novembre par le vote des députés shiites, alliés aux kurdes, qui, le 26, passant outre l’opposition des députés sunnites ont adopté à une majorité proche des deux tiers une loi de « Mobilisation Populaire » officialisant les milices shiites et leur donnant un pouvoir et une immunité quasi absolue. Ces milices shiites dont les effectifs s’élèvent à environ 140 000 hommes sont mieux équipées et entrainées que l’Armée irakienne. Ce vote marque la fin de l’unité nationale fondée sur le respect des intérêts des différentes communautés, symbolisée et garantie par l’Armée Irakienne. On se dirige ainsi en Irak vers le modèle iranien où les « Pasdarans iraniens » ont pour principale mission de protéger le système politique. Les milices seront, comme en Iran, directement rattachées au Premier Ministre Haider al-Abadi.
En pleine guerre pour la reconquête de Mossoul, les députés shiites ont ainsi enterré le processus de réconciliation nationale et l’espoir d’un Etat irakien respectant ses diverses composantes ethniques et religieuses. Alors que le Kurdistan possède ses Peshmergas, seuls les sunnites n’ont pas de milice et seront désormais encore plus marginalisés en Irak, coupables d’avoir accueillis l’Etat islamique. Malheureusement cette loi va avoir un impact sur le terrain et ne va pas favoriser l’unité nécessaire entre les différentes forces irakiennes pour reprendre Mossoul. En effet, elle n’est pas de nature à motiver l’armée irakienne qui, de part cette nouvelle loi, est condamnée à être , comme en Iran, une force de gardes-frontières, sous-équipée, moins payée et moins considérée que les unités des « gardiens de la révolution ».
Situation militaire
Mossoul
Six semaines après le début de l’offensive, la 16ème division et les forces spéciales irakiennes, qui ont pris pied dans les faubourgs Est de Mossoul, font face à une résistance acharnée. D’après un colonel de cette division, les combats à l’intérieur de la ville de Mossoul sont un cauchemar pour les soldats irakiens qui font face sans répit à des attaques suicides surprises et à des tirs de snipers. Pour se déplacer à Mossoul, les combattants de Daech utilisent un réseau de longs tunnels souterrains qu’ils ont creusés depuis la prise de la ville en juin 2014.
Au Sud-Est de Mossoul, la 9ème division a repris, après de violents combats, le site archéologique de Nemroud qui se trouve à une dizaine de km au Nord du confluent du Tigre et du grand Zag et progresse difficilement vers les faubourgs Sud-Est de Mossoul.
Au Sud de Mossoul, la 15ème division est en vue des hauteurs du Monastère de Saint Elie (Dair Mar Elia qui a été rasé par Daech) dont les ruines dominent l’autoroute n°1 qui conduit à l’aéroport de Mossoul.
A l’Ouest, les milices de l’Organisation Populaire se sont emparées de l’aéroport de Tall Afar le 23/11 et ont annoncé le 28/11 leur jonction avec les Peshmergas réalisant ainsi l’encerclement complet de Mossoul.
Dans le gouvernorat d’Al Anbar, Daech contrôle toujours l’Ouest du gouvernorat et notamment les villes de Rawa, Ana et Kaïn.
Pour fixer les forces irakiennes et éviter que des prélèvements d’unités viennent renforcer les assaillants de Mossoul, Daech a lancé une grande campagne d’attentats dans 8 autres gouvernorats. On dénombre ainsi en novembre plus de 1000 morts victimes d’attentats parmi les forces de l’ordre et la population.
Le nombre de morts dans les gouvernorats touchés se répartit comme suit :
Nineveh : 436 ; Kirkuk 151 ; Salahuldein 150 ; Al Anbar 145 ; Babel 82 ; Bagdad 72 ; Diyala 20 ; Karbala 10.
Comme je l’ai toujours annoncé, la prise de Mossoul n’aura donc pas lieu en 2016, démentant une fois de plus les prévisions optimistes de Monsieur Le Drian.