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Mali, certitudes, risques et objectifs politiques et militaires de la France

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Les certitudes

Grâce à nos bases et aux forces armées pré positionnées en Afrique, la France était la seule puissance capable de porter sans délai un coup d’arrêt  à l’offensive des rebelles et des terroristes vers Bamako.

Les armées françaises ont une grande expérience politique et militaire des combats au Sahel du fait de notre engagement continuel au Tchad de 1969 à nos jours.

Que peux-t-on  tirer comme enseignement de cette expérience ?

  • Jamais les gouvernements noirs du Sud n’ont pu établir durablement leur contrôle sur les territoires et les populations qui vivent dans les zones désertiques. En conséquence, nous pourrons reprendre Tombouctou, Gao, mais nous ne pourrons jamais contrôler les déserts au nord du Niger jusqu’à la frontière algérienne sauf si nous favorisons l’installation à Bamako d’un gouvernement dirigé par un leader du Nord, ce qui est le cas au Tchad ou si le gouvernement malien se résigne à négocier avec les leaders Touaregs une large autonomie de Azewad.

  • Il n’y aura jamais une armée malienne capable d’assurer la sécurité de son territoire tant que les militaires putschistes ne seront retournés pas dans leurs unités ou n’auront été mis en prison et qu’un pouvoir politique élu démocratiquement ne sera pas installé à Bamako.

  • Les gouvernements de la CEDEAO n’ont ni mes moyens ni la volonté d’aider de manière décisive le Mali et l’armée malienne.

  • Le risque d’exactions et de massacres contre les populations Touaregs par les forces armées et de sécurités maliennes lors d’une offensive vers le Nord ne doit pas être sous-estimé.

    Les objectifs politiques et militaires qui en découlent pour le gouvernement français

  • Se limiter dans un premier temps à assurer la sécurité du Sud malien en s’opposant à toute attaque des forces rebelles au-delà d’une ligne Mopti - Sandare. Cet objectif doit permettre d’assurer la protection de nos ressortissants et de fournir les délais nécessaires à la mise en place d’un pouvoir politique légitimement élu à Bamako et à rebâtir une armée malienne capable de prendre à sa charge le combat terrestre.
  • Ne viser sur le plan militaire que l’affaiblissement des forces terroristes et en aucun cas afficher l’objectif de leur destruction, ce qui est irréalisable. La rébellion Touareg est endémique et ne pourra être réduite que par la négociation politique. Faire porter l’effort militaire sur les forces d’AQMI et le MUJAO tout en poursuivant les contacts et les négociations avec Ansar Diné avec lequel il ne faut pas fermer la porte de la réconciliation nationale.
  • N’appuyer la reconquête des villes importantes du Nord Tombouctou, Gao et Kidal que lorsque ces deux dernières conditions politiques et militaires seront remplies en affichant clairement que cet objectif doit être lié étroitement avec l’installation dans ces villes de responsables politiques issus du milieu Touaregs restés fidèles ou neutre depuis septembre 2012.
  • Mettre en place au niveau de chaque compagnie malienne une équipe de conseillers qui aura une mission officielle de conseil et officieuse de veiller à ce que les forces maliennes n’exercent aucune représailles contre la population de ces villes.
  • L’objectif de destruction des forces d’AQMI et de Mujao ne sera pas réalisable sans un engagement militaire des pays voisins du Mali et en particulier de l’Algérie et sans la mise en place d’une coalition comportant des forces des principaux pays européens et l’aide des États-Unis.

La stratégie à mettre en place doit donc être globale et combiner étroitement les manœuvres diplomatique, politique et militaire qui seule peut permettre d’éradiquer l’instabilité sahélienne dont il ne faut pas sous-estimer la force des racines et la capacité de nuisance.

Général (2S) Jean-Bernard PINATEL

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