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Face aux risques des missiles sol-air libyens disparus des arsenaux de Kadhafi, quelles parades ?

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La disparition en nombre de missiles sol-air dans les arsenaux de Kadhafi inquiète les responsables occidentaux. Alain Juppé aurait cité le chiffre de 10 000 systèmes sol-air. De son côté, le général Mohamed Adia, chargé de l’armement au sein du ministère de la Défense du Conseil national de transition (CNT), évalue à environ 5 000 le nombre de missiles SAM-7 qui sont toujours manquants dans les arsenaux libyens.
La porte-parole du département d’Etat américain, Mme Victoria Nuland, a indiqué vendredi 7 octobre que neuf équipes américano-libyennes travaillent actuellement en Libye pour sécuriser les dépôts d’armes et tenter de récupérer les armes pillées dans le sillage des soulèvements populaires dans ce pays. Elle a aussi fait état de la disparition d’importants lots de missiles sophistiqués parmi lesquels des missiles à tête chercheuse thermiques SA-24.

Quels sont les risques pour le transport aérien si ces disparitions se confirment ?

Pour répondre de façon réaliste à cette question, il faut limiter le risque aux missiles sol-air SAM-7 et SA-24 portatifs qui ont été livrés par les russes aux autorités libyennes parce qu’ils peuvent être exfiltrés facilement du territoire libyen puis être utilisés par des combattants non spécialement formés à cet effet et ne disposant pas des matériels et des compétences nécessaires pour assurer la maintenance électroniques de systèmes sophistiqués.

La menace du SA-24 apparaît au premier abord la plus grave, s’il se confirme qu’il ne s’agit pas uniquement de missiles de rechange sans leur système de lancement. La portée du SA-24 est, en effet, de l’ordre de 6000 mètres d’altitude alors que les dernières versions du SAM-7 ne dépassent pas les 3500 mètres d’altitude. Par ailleurs, le système d’autoguidage du SA-24 est beaucoup plus sophistiqué et bien plus difficile à décevoir. Heureusement cette menace est à nuancer. En effet, dès mars 2011, un haut responsable de la société russe « KBM Machine-building design bureau », tout en confirmant que son entreprise avait fourni aux forces gouvernementales libyennes des SA-24 Grinch, a précisé qu’ils étaient montés sur camions et ne pouvaient pas être utilisés en systèmes portatifs car cela nécessiterait des systèmes de mise à feu séparés qui n’ont pas été fournis à la Libye. S’il s’avère qu’un ou plusieurs camions équipés ont pu s’exfiltrer, cette menace sera à prendre en compte bien que ces systèmes seront plus facilement repérables et plus difficiles à maintenir en état de tir que des systèmes portables.

On saura probablement assez rapidement s’il faudra toujours craindre cette menace car leur nombre était limité à quelques dizaines, alors que perdurera longtemps la menace des SAM-7 qui étaient stockés par milliers.

La menace des SAM-7 pour les avions de transport et les parades envisageables

Sont d’ores et déjà exclus du champ de cette menace les avions de la compagnie aérienne israélienne El-Al, les avions des chefs d’Etat et tous les avions et hélicoptères de transport militaires qui sont équipés de contre-mesures.
Les versions les plus modernes de SAM-7 peuvent engager des avions volant jusqu’à 3500- 4000 mètres d’altitude ce qui exclut les avions commerciaux civils en transit qui volent à environ 10 000 mètres d’altitude. En revanche, ils constituent une menace à prendre en compte pour les avions décollant ou atterrissant dans les aéroports.

Quelles ont les parades utilisées avec succès dans les pays à risque comme en Irak ou en Afghanistan ?

La portée horizontale des SAM-7 étant de l’ordre de 4 km, il s’agit de définir un périmètre de sécurité de cet ordre de grandeur autour des aéroports menacés et de le surveiller par des moyens électroniques et des patrouilles. Mais cette protection est trop lourde à réaliser 24 heures sur 24. Il faut donc concentrer les arrivées et les départs sur les aéroports menacés dans une courte période de 2 ou 3 heures par jour. Les procédures d’approches doivent être aussi modifiées. La perte d’altitude depuis 4000 mètres s’effectue par une descente et une montée en spirale ou très raide et au-dessus de la zone sécurisée. Enfin, des dispositifs contre les autodirecteurs infra-rouge des SAM-7 peut être montés sur des avions civils que l’on spécialisera pour la desserte des aérodromes à risques. Le système le plus efficace et le moins susceptible de causer des dommages aux abords des aéroports est d’envoyer, sur l’autodirecteur du missile, un faisceau infrarouge plus puissant que la signature de l’avion à protéger. En effet les dispositifs à base de fusées ou de torchse risquent de causer des incendies dans les zones habitées qui généralement entourent les aéroports.

Si ces disparitions se confirment, c’est ce type de mesures qu’il va falloir envisager de mettre en place dans la bande sahélienne.

Général (2S) Jean-Bernard PINATEL

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