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Aqmi revendique l’exécution d’un otage français : pourquoi cela n’impactera pas les opérations en cours au Mali

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Aqmi affirme avoir exécuté le géopolitologue Philippe Verdon, capturé au Sahel en novembre 2011. Que cette information soit confirmée ou non, elle pose la question du sort des otages français retenus par les djihadistes alors que l’intervention au Nord-Mali se poursuit.

Atlantico : Aqmi a annoncé dans la nuit via un communiqué qu’un des otages français avait été tué récemment en représailles de l’intervention au Mali. L’exécution, si elle est avérée, peut-elle impacter la suite des opérations en cours ?

Jean-Bernard Pinatel : Il ne faut pas commencer à brasser du vent à partir d’une information qui n’est pas vérifiée.

Sur un plan plus général, la présence d’otages ne peut impacter en rien la stratégie opérationnelle de l’Armée française et la conduite des opérations. Je note d’ailleurs que malgré un ratissage systématique du massif des Ifoghas, aucune présence d’otage n’a été signalée.

Pourquoi ? Parce que les otages sont un bien trop précieux pour tous les laisser dans la zone de combat. Ils ont été probablement évacués, en tout ou partie, vers le Nord Niger. En effet, à partir du moment où les Algériens ont bouclé la frontière Nord, le massif de l’Aïr à l’Ouest d’Arlit peut être une bonne zone refuge. Il est encore plus impénétrable que les Ifoghas et culmine avec le mont Bagzane à plus de 2000 mètres d’altitude et c’est la route traditionnelle des chameliers vers le Nord Tchad ou le Sud Libye et à terme l’Egypte et le Moyen-Orient.

A terme, cette exécution représenterait-elle plutôt un mauvais calcul pour les djihadistes ?

Il ne faut pas voir AQMI composé uniquement de « jusqueboutistes ». Certes il y a nombre de fanatiques religieux dans ses rangs mais aussi des spécialistes des enlèvements et des négociations pour les libérer comme Mokhtar Belmokhtar, des trafiquants. Plus AQMI est affaibli, plus les « jusqueboutistes » sont obligés de tenir compte des intérêts et des opinions des autres.

En 1977 la France intervient en Mauritanie contre le Polisario qui détient 8 otages français enlevés à la mine de fer de Zouerate en Mai et en Octobre 1977. En moins de trois mois les Jaguars de l’armée de l’Air française guidés par les Breguet Atlantic de la Marine causent des pertes énormes aux colonnes du Polisario qui s’attaquaient au chemin de fer transportant le minerai de Zouerate à Nouadhibou. Le Président Boumediene [1], qui voit sa stratégie saharienne mise à mal par l’intervention française, les fait conduire de Tindouf où ils sont détenus à Alger et les libère à Noël 1977.

Un scénario de ce type peut-il se reproduire ?

Rien n’est impossible dans ce Sahel où les influences les plus diverses s’entrecroisent. Il suffirait qu’un des sponsors d’AQMI décide de jouer le même rôle de libérateur…

Peut-on dire que cette annonce révèle une certaine fébrilité d’AQMI au Sahel ?

Rien ne dit aujourd’hui que cette information soit vraie. Et même si un otage venait à décéder rien ne dit que c’est parce qu’il a été exécuté.

Source : ATLANTICO

[1] Il fut le deuxième président de la République algérienne démocratique et populaire du 19 juin 1965 au 27 décembre 1978.

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